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Auguste Le DENTU:Sur la route de Rouvray

Auteur : Poulot  Créé le : 01/05/2013 09:16
Modifié le : 12/03/2017 09:00
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Les lignes qui suivent sont extraites du livre d'Auguste Le DENTU

chapitre VII.

Elles sont reproduites ici avec l'aimable autorisation de Charles le DENTU

 

Sur la route de Rouvray

 

Nous n’arrivons que vers dix heures à Saint-Péravy, où nous traversons le dix-septième corps qui y fait sa grande halte. Les soldats préparent leur soupe. D’après de nouveaux renseignements, le seizième corps est en avant ; comme toujours, nous tombons au milieu des bagages et mes voitures sont obligées de prendre la file.

A quelque distance de là, j’entendis nettement le canon. Une grande partie allait se jouer et nous étions aux premières places pour la suivre, au moins dans quelques-uns de ses incidents. Une fumée abondante commençait à lancer vers le ciel ses noirs tourbillons. Nous atteignîmes Patay. A ce moment (onze heures), le bourg n’était point occupé. A mesure que nous avancions sur la route qui de Patay gagne Terminiers en obliquant à droite, le bruit des détonations prenait une plus grande intensité (Voir la carte IV). Un peu en avant de Rouvray, le convoi s’arrêta ; on nous fit place et nous continuâmes notre marche. Une faible élévation du sol à quelque distance devant nous nous empêchait encore de nous rendre compte de ce qui se passait. Mais nous étions bien près du champ de bataille ; car les coups de canon nous ébranlaient vigoureusement le tympan. Je sentais la commotion de l’air. « Pour le coup, nous disions-nous, nous sommes dans le mouvement. » Je fis mettre les chevaux au trot pour être plus tôt au village.

 

Nous rencontrâmes tout d’abord un convoi de plusieurs voitures de blessés qui arrivaient par la route de droite (celle d’Artenay). Immédiatement après venaient trois ou quatre batteries d’artillerie. L’officier qui était en tête avait l’air consterné. Nos premières informations portèrent un rude coup à notre confiance. Un régiment de marche, pris de panique, avait lâché pied et abandonné une batterie qu’il était chargé de soutenir. Un escadron de uhlans venait de s’en emparer sans la moindre difficulté.

L’aile droite avait été fortement ébranlée par cette panique. Elle commençait un mouvement sur la gauche, dont je ne pus bien me rendre compte que plus tard, dans le courant de la journée.

Il y avait déjà de nombreux blessés dans le village. M. de Combarieu, chirurgien en chef du quartier général, m’en abandonna une bonne moitié. Nous nous mîmes à l’œuvre à l’instant.

Le canon faisait trembler les murs des maisons. Deux batteries françaises s’étaient établies à une centaine de mètres en avant de la ferme où nous étions installés, et échangeaient un feu nourri avec les batteries prussiennes. L’infanterie était massée en arrière, à une cinquantaine de mètres. Les obus ennemis ne l’atteignaient pas ; ils éclataient un peu au-devant d’elle, après avoir passé parfois par-dessus les batteries. Aucun projectile n’arriva jusqu’à nous ; mais d’un moment à l’autre la situation pouvait se modifier. Un très-faible mouvement de retraite nous eût placés en avant de la ligne de bataille.