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La Bataille de Loigny le 2 décembre 1870 par J.F. MALON

Auteur :  Créé le : 17/01/2014 10:22
Modifié le : 17/01/2014 18:42

Avertissement : <loirebeauce-encyclopedia.fr> reproduit ci-dessous in extenso l'adresse faite par J.F. Malon, aux participants à la commémoration qui a marqué le 143ème anniversaire de la bataille de Loigny le 1er décembre 2013. Après avoir rappelé le contexte géopolitique de l'époque, il nous fait un reportage précis des événements qui ont marqué à jamais le village de Loigny, ce 2 décembre 1870

Discours prononcé

par M Jean-François MALON président des Amis de Sonis-Loigny

 

Monsieur le Préfet,

Monsieur le Député,

Monsieur le Sénateur, Président du Conseil Général,

Monsieur le Conseiller Général,

Messieurs les Maires,

Monsieur le Délégué Militaire Départemental,

Messieurs les Officiers Généraux,

Mon Colonel,

Monsieur l’Aumônier Régional de la Zone de Défense Ouest,

Mesdames et Messieurs les représentants des Associations patriotiques,

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs les descendants et parents des combattants,

Chers Amis,

C’est le 13 juillet 1870 que la dépêche d’Ems, envoyée à Paris, enflamme l’Assemblée Nationale. Le message du roi Guillaume de Prusse, habilement tronqué par le Chancelier Bismark, est jugé insultant pour l’honneur de la France, qui déclare la guerre le 17 juillet. Très vite, les combats s’engagent sur le sol … français : à Woerth le 6 août, à Gravelotte le 16.

Sedan, et l’Empereur Napoléon III, tombent le 2 septembre.

Le 4, la République est proclamée à Paris ; elle décide de continuer la guerre, à la stupeur des allemands, qui vont alors assiéger Paris. Le 20 septembre, la capitale est encerclée.

Le même jour, la ville éternelle, Rome, tombe aux mains des assaillants italiens.

En France, des armées de secours sont créées, pour délivrer Paris. La plus importante est constituée à Bourges, Nevers et Vierzon : c’est l’Armée de la Loire.

Les 1er combats s’engagent à Artenay, le 10 octobre. Le 11, cette armée abandonne Orléans, non sans résistance.

Il faut attendre le 9 novembre pour que, sous les ordres du Général d’Aurelle de Paladines, notre armée remporte une victoire, à Coulmiers.

Orléans, reprise par les troupes françaises, est mise en état de défense. Cependant, la délégation du gouvernement provisoire, à Tours, ordonne de reprendre l’offensive.

Sur notre aile droite, près de Pithiviers, notre armée a pour objectif de marcher sur Fontainebleau. Elle est battue, à Beaune la Rolande, le 28 novembre, malgré de vaillants combats.

Le 1er décembre, sur notre aile gauche, les troupes du 16ème Corps d’Armée remportent une victoire d’avant-garde, à Villepion. Le soir, l’Etat-major de l’amiral Jauréguiberry dort au château.

Au matin du 2 décembre, le général Chanzy, fort du succès de la veille, est confiant. Il engage le combat ; la division Barry entre à Loigny que les bavarois ont évacué à 6 heures 30. Cependant, Morandy arrive trop tard à Lumeau, occupé par les allemands une demi-heure plus tôt. Retard malheureux, il divise notre armée, séparant le XVème Corps de Martin des Pallières, stationné à Artenay, des 16 et 17ème Corps.

Barry devant reculer, Jauréguiberry le soutient par la gauche, essayant de prendre Goury. En vain.

L’artillerie allemande est écrasante. De 11 heures à 14 heures, nos soldats se cramponnent au terrain, quand un ouragan de feu les oblige à se replier sur Nonneville. Il est 14 heures 15.

A 11 heures, Chanzy, depuis le clocher de Terminiers, s’était rendu compte que les opérations tournaient mal. Il a demandé l’aide du Général de Sonis, qui est à Patay. Vers midi, les troupes disponibles du 17ème Corps marchent sur Loigny.

Les allemands s’efforcent de reprendre Loigny , bientôt encerclé. Mais le 37ème Régiment de Marche, commandé par Fouchier, tient le cimetière, au centre du village. Il tiendra jusqu’au bout.

Il est bientôt 15 heures.

Le 51ème Régiment de Marche est en avant de Villepion.

La cavalerie du Prince Albert de Prusse essaie de nous tourner par la gauche, à Nonneville. Elle est repoussée par les mitrailleuses.

Le vent est froid, malgré un soleil qui brille dans un ciel clair.

Face à l’artillerie prussienne, le 51ème de Marche ne tient plus. C’est bientôt la panique. Si l’armée est coupée en deux, elle sera anéantie.

Pour sauver l’armée, Sonis fait appel à sa réserve. Il est 16 heures 15.

Cette troupe doit parcourir, depuis Villepion jusqu’à Loigny, 1.500 mètres à terrain découvert.

Avant de s’élancer, le Commandant de Troussures, d’ordinaire réservé, s’était jeté au cou de Sonis : « Mon Général, que vous êtes bon de nous mener à pareille fête ». Il voulait parler des noces avec l’Agneau de l’Apocalypse.

C’est au cours de cette charge, restée fameuse, que le sergent de Verthamon déploie la bannière du Sacré-Cœur, avant d’être frappé en pleine poitrine.

Le 1er Bataillon des Volontaires de l’Ouest, les Mobiles des Côtes du Nord, les francs-tireurs de Tours et de Blida – 800 hommes en tout - , vont ainsi bousculer et déloger 1.200 prussiens et bavarois retranchés dans un bois, en avant de Loigny.

Cette fois, les combats se font à la baïonnette. Nos soldats atteignent les 1ères maisons de Loigny, et voudraient donner la main à ceux qui tiennent le cimetière.

Cependant, les allemands font donner leur dernière réserve. La situation n’est plus tenable, et le Colonel de Charette ordonne la retraite, avant d’être blessé à la cuisse.

L’armée française se retire, et les troupes du Grand Duc de Mecklembourg restent maître du terrain.

Le Général de Sonis a lui-même été grièvement blessé à la jambe, au plus fort de la charge. Il passe la nuit, glaciale, sur le champ de bataille, à l’endroit même où se dresse le monument qui est devant vous.

Il en sera relevé le lendemain, vers midi, pour être emmené au presbytère, où il sera amputé de sa jambe, le dimanche soir.

Au même moment, l’armée allemande reprend Orléans, que l’armée de la Loire évacue pour la 2ème fois.

143 ans après ces événements glorieux et douloureux, nous venons rendre hommage à ces soldats de tous grades et de toutes conditions, de tous bords aussi, qui ont donné leur vie sans compter, pour la défense de leur pays, de leurs familles, et de leurs valeurs, qui sont aussi les nôtres.

143 ans après ce que l’histoire a retenu comme une glorieuse défaite, nous sommes présents en ce jour pour rendre les honneurs à ces hommes épris de liberté,

liberté pour résister à l’oppression de l’envahisseur,

liberté d’obéir à ses chefs, d’autant plus facile à mettre en œuvre qu’un climat de confiance a pu être établi,

liberté de dépasser ses propres peurs, par ailleurs légitimes, pour ne pas courber la tête alors que les balles et les éclats d’obus sifflent de toute part,

cette liberté pleinement vécue et éclairée par la recherche de la vérité, qui a conduit ces hommes à accepter de donner jusqu’à leur vie, pour le bien des personnes aimées,

rappelant ainsi que la mesure d’aimer,

c’est d’aimer sans mesure.