Charsonville - La seigneurie de Vilaine
Il existe sur la commune de Charsonville un hameau nommé « Vilaine ». Il est situé au sud du bourg de Charsonville, en limite avec le département du Loir-et-Cher.
Selon certains historiens, l’origine du nom « Vilaine » proviendrait du latin « Villana » qui était le diminutif de « Villa » et qui désignait une petite exploitation rurale.
Au 19ème siècle, ce lieu était composé de 3 zones distinctes : Le Soy, Vilaine et la Mercellerie (voir figure 1 ci-dessous).

Le présent document signale la présence d’une seigneurie à Vilaine dès 1649 et recense les noms des principaux propriétaires de la ferme de Vilaine depuis 1652 jusqu’à aujourd’hui.
Il faut rappeler qu’autrefois le terme « seigneurie » désignait la ferme et la « terre » sur laquelle le propriétaire (le seigneur) avait des droits de justice, de chasse, de perception des rentes… Ces droits étaient liés à la terre elle-même et non à son propriétaire.
Description de la ferme de Vilaine en 1714
La ferme, en 1714, était composée de « chambres avec maison à demeures et toits en tuiles », de granges, de bergeries, de toit à vaches, de fournil pour cuire le pain et d’une volière peuplée de pigeons (laquelle démontrait la noblesse du propriétaire et le droit de justice).
Un puits à eau était implanté dans la cour de la ferme et celle-ci était entourée de murs.
Selon le plan de Charsonville levé en 1670 et le bail, il existait une petite garenne pleine de « buissons d’épines », située à proximité de la ferme (voir figure 2 ci-dessous).
Dépendaient de la ferme (métairie) des terres labourables « en 3 saisons ». Elles représentaient une surface de 15 muids environ, soit environ 80 hectares, situés sur le terroir de Vilaine et d’Ouzouer-le-Marché.

Famille de Courtenay
Le premier propriétaire, connu actuellement, est Joseph de Courtenay, fils de Jacques III de Courtenay et de Françoise de Loron. Son nom apparaît dans les registres paroissiaux de Charsonville, le 1er novembre 1652, car il était le parrain du nouveau né Joseph Imbault, fils de Léonard Imbault (1619-1676), laboureur à la ferme de Vilaine et de Françoise Hagou (1629-1656).
Joseph de Courtenay, marié à Catherine Guyon de la Mothe, décéda vers 1674. Il laissa en héritage, à sa fille Catherine de Courtenay, née et baptisée le 10/7/1649 à Estouy (village situé au nord-est de Pithiviers), la seigneurie de Vilaine. Par la suite, Catherine de Courtenay épousa, en 1686, Charles de Gauville, seigneur d’Ascoux (village situé au sud de Pithiviers). Elle apportait en dot la seigneurie de Vilaine dont elle était propriétaire. La Seigneurie de Vilaine était composée à cette époque des bâtiments de la ferme, d’une garenne et de terres.
Une seule enfant naquit de cette union ; Catherine de Gauville (née à Ascoux le 23/11/1686). En effet, quelques jours après la naissance de sa fille, Catherine de Courtenay décéda à Ascoux le 2/12/1686 vers 10h du matin. Elle laissait en héritage familial, à sa fille, la seigneurie de Vilaine.
Quatre ans plus tard, son père ; Charles de Gauville, épousait le 9/3/1690, Marie Charlotte de Hangest-Argenlieu (1643-1705). Le nouveau couple et Catherine de Gauville, alors âgée de 4 ans, s’installèrent à Paris, à l’ancienne Estrapade, faubourg St Jacques, paroisse St Benoît.
Cependant, certaines terres de la Seigneurie de Vilaine étaient soumises à des anciennes obligations féodales (serment de foi et hommage) qui liées le souverain (seigneur de Charsonville) à son vassal (le seigneur de Vilaine). La propriétaire de la seigneurie de Vilaine, Catherine de Gauville, était alors trop jeune (13 ans) pour prêter serment. C’est pourquoi, le 22 juillet 1699, Charles de Gauville, tuteur de sa fille mineure, donna pouvoir à Léonard Gasnier (1635-1704), laboureur à la ferme de Vilaine et Syndic de la paroisse de Charsonville (on dirait aujourd’hui maire) pour demander et obtenir du seigneur de Charsonville « souffrance » pour sa fille mineure. « Souffrance » était un terme de coutume féodale. Le vassal qui se trouvait dans l’obligation de prêter foi et hommage à son seigneur, avait un délai de 40 jours pour s’acquitter de ce devoir. Si le délai était insuffisant le vassal requérait « souffrance », c'est-à-dire un répit. La souffrance féodale était donc la prolongation consentie par le seigneur dominant au profit de son vassal du délai légal de 40 jours. Le cas de minorité et de tutelle rendait facile l’obtention de la souffrance.
Famille de Gauville
Catherine de Gauville, héritière, par sa mère, de la seigneurie de Vilaine, épousa Charles François de Drouin (1669-1746), seigneur de Bouville, « gouverneur de la ville et du château de Pithiviers ». Le couple demeurait au château de Bouville à Estouy. Ce domaine appartenait depuis 1558 à la famille Drouin. Ils eurent 8 enfants : Elisabeth (1711), Magdeleine (1712), Charlotte (1714), Philippe (1715), Charles (1716), Robert (1717), Catherine (1719), et Marie Louise (1720).
On retrouve dans les archives de Charsonville la signature d’un bail en 1714 de Charles François de Drouin avec Toussaint Cornuau (laboureur), d’une durée de 9 ans, pour l’exploitation de la métairie située au « village » de Vilaine, moyennant la somme de 550 livres par an et six chapons par an à Noël. En effet, sa femme, ne pouvant pas se déplacer (80km entre Estouy et Charsonville), après la naissance de leur fille Charlotte, avait donnée procuration à son mari pour signer le bail chez le notaire de Charsonville.
A la fin de sa vie, Catherine de Gauville, probablement malade, et son mari trop âgé pour réalisé le voyage de son château jusqu’à Charsonville, donna, dans son château de Bouville, le 24 avril 1741, pouvoir à Jean Gonelle (notaire à Charsonville), pour signer un bail de 6 ou 9 ans avec Toussaint Corneau moyennant la somme de 600 livres par an (200 livres à la Toussaint, 200 livres à Noël et 200 livres à la saint Jean) et 6 chapons à apporter au château de Bouville. C’est ainsi que le 2 mai 1741, Jean Gonelle signa, pour le compte de la « dame propriétaire de la ferme et seigneurie de Vilaine » demeurant à Bouville, paroisse d’ Estouy, un bail de 6 ou 9 ans avec « Toussaint Corneau demeurant au lieu seigneurial de Vilaine » pour les terres et métairie de Vilaine et toutes ses dépendances.
Quelques mois après Catherine de Gauville décèdera à l’âge de 56 ans, le 21 novembre 1741 et sera inhumée, le lendemain, dans le chœur de l’église St Martin d’Estouy.
Famille Demeulle
En 1771 Marc Joseph Demeulle (ou De Meules), né le 9 décembre 1751, était le nouveau propriétaire de la ferme de Vilaine. Dans le bail, de la ferme « du Grand Vilaine », il était nommé « seigneur de Vilaine ». Marc Joseph Demeulle était conseiller du Roi et du duc d’Orléans, maître particulier des eaux et forêts de Beaugency.
Veuf de Renée Flore Parent, il épousa le 19/8/1783 à Beaugency, Marie-Anne Françoise Tardif (1764-1786), née à Beaugency (paroisse St Firmin), fille unique de Michel Tardif (1732-1768) conseiller du Roi, avocat au parlement et de Marie Chartier.
La famille Tardif était une très ancienne famille de notable de Beaugency. Elle habitait la paroisse St Firmin qui avec celle de St Nicolas formaient la ville de Beaugency.
Pour l’anecdote, la paroisse de St Nicolas se composait de gens modestes (artisans, vignerons…) alors que celle de St Firmin comprenait principalement des personnes distinguées qui méprisaient sans doute un peu les autres et ne voulaient pas se confondre, dans les processions, avec ceux qui n’étaient pas de la même qualité. La ville basse de Beaugency autour de St Nicolas était qualifiée de « paroisse des sabots » et la ville haute autour de St Firmin « la paroisse des souliers ».
Marie-Anne Françoise Tardif décéda à l’âge de 22 ans le 21/6/1786 à Beaugency (St Firmin).
Longtemps après le décès de sa femme, Marc Joseph Demeulle, habitant Beaugency, épousa en 1798, à Orléans, Thérèse Seurrat de La Boulaye (1769-1813). Son beau père était Jacques-Isaac Seurrat de La Boulaye (1728- 1803), neveu de Etienne Seurrat de La Barre (père de Mme Seurrat, inhumée dans l’actuel cimetière de Charsonville, épouse de Prosper Tassin de Charsonville qui fut le dernier seigneur de Charsonville).
Marc Joseph Demeulle décéda le 24/5/1806 à Beaugency.
Famille Dabout
Après la Révolution, la famille Dabout fut propriétaire de la ferme de Vilaine durant presque tout le 19ème siècle. Il faut citer ici les deux principaux propriétaires et anciens maires de Charsonville que furent Louis Dabout (1792-1878) marié à Eulalie Neveu (1791-1874), Charles Dabout (1827-1914), maire de la commune, marié en seconde noce à Armande Gaullier (1833-1917).
Famille Beaujouan
Puis, vers la fin du 19 ème siècle et au début du 20 ème siècle, Léon Clovis Beaujouan (1871-1901) et sa femme ; Suzanne Léliard furent les propriétaires de la ferme de Vilaine. Leurs deux enfants se nommaient Ida (1897) et Léa (1899). Malheureusement Léon Beaujouan décédera en 1901 laissant seule sa femme gérer la ferme de Vilaine.
Famille Vivier
Ida Beaujouan se maria le 12/4/1920 avec Paul Maurice Vivier (fils de Jules et de Louise Vrain), né à Saint Léonard-en-Beauce (41) le 2/8/1891. Depuis 1920 environ jusqu’à aujourd’hui la famille Vivier est propriétaire de la ferme de Vilaine.
Sources
Archives départementales du Loiret
Le Loiret Généalogique
Geneanet
Gallica









