Charsonville - Quand le cimetière était au centre du bourg - La translation hors du village - (2/3)
Préambule
On ne connaît pas la création de l’ancien cimetière de Charsonville. Cependant, je pense que comme partout en France, il est possible qu’il soit apparu vers le 11 ou 12 ème siècle.
Durant 900 ans, les habitants de Charsonville vont vivre avec le cimetière au centre du bourg, à proximité de l’église. Il était même nécessaire de le traverser pour aller à l’église.
Mais, vers la fin du 19ème siècle, un bouleversement se produisit dans l’esprit de tous les habitants de Charsonville ; leur cimetière, « lieu d’inhumation communautaire au milieu des vivants », allait être déplacé hors du village.
Le document intitulé « Quand le cimetière était au centre du bourg » comporte les 3 parties suivantes :
1ère partie : l’inhumation jusqu’en 1898
2ème partie : la translation du cimetière hors du village
3ème partie : la nouvelle place du village
A l’aide des archives du Loiret, c’est la 2ème partie : « la translation du cimetière hors du village» que le présent document va décrire.
Origine du projet
Voici ci-dessous les principaux éléments du rapport qui mit fin à l’inhumation des corps dans le cimetière situé au centre du bourg et décida du déplacement du cimetière hors du village.
Tout commence en 1888. Le Préfet du Loiret rappelait, une nouvelle fois, à la commune de Charsonville qu’il était nécessaire de déplacer le cimetière selon l’instruction ministérielle du 30 octobre 1843 qui réglait les conditions dans lesquelles devait s’opérer la translation des cimetières situés au centre des habitations.
Et afin de montrer à la commune les inconvénients de la situation actuelle, le Préfet décida d’ouvrir une enquête d’hygiène et de salubrité publiques fin 1888.
Le rapport ci-dessous, de cette enquête, classé dans les archives du Loiret, nous apporte des précieux renseignements et une image assez effrayante sur l’état de l’ancien cimetière.
Le cimetière possédait une superficie de 2030 m2. Il était limité au nord par l’église, la place du marché au sud. A l’ouest il était bordé par des maisons qui lui étaient contiguës et à l’est par une large rue. La situation était aggravée par le fait que l’église, très élevée, empêchait les vents du nord d’aborder le cimetière et de tempérer la chaleur qui, pendant l’été devait favoriser l’exhalation des gaz résultant de la putréfaction.
Le sol du cimetière dans toute son étendue, était surélevé de 40 cm à 1,80m. C’est ainsi que cette différence de niveau atteignait dans la partie qui longeait la place du marché (soit côté rue actuelle du 11 novembre), sur une longueur de 120m environ, une hauteur de 1,80m.
Le mur de clôture, côté place du marché, était de 2m en 2m pourvu de barbacanes destinées à favoriser l’écoulement des eaux pluviales qui, sans cette précaution, inonderaient le cimetière. Mais ces eaux, à cause de la différence de niveau entre le sol du cimetière et celui de la place (environ 1,80m), lavaient les sépultures et entraînaient sur la voie publique des liquides chargés de matières organiques en décomposition, les corps n’étant inhumés qu’à une profondeur maximum de 1,50m.
Le cimetière avait une surface suffisante, si en effet, on déduisait des 2030 m2 qu’il occupait la superficie des allées, soit environ 450m2. Les sépultures n’étant relevées que tous les 17 ans, et ne pouvant, du reste, l’être plus fréquemment à cause de la nature du terrain, il restait une superficie de 1580m2 qui représentaient à peu près ce qu’il fallait de terrain pour inhumer 395 corps. Ce chiffre était exactement celui des décès qui s’était produits à Charsonville depuis 17 ans.
Le sol, fréquemment remué, était constitué par un humus pulvérulent qui se laissait difficilement tasser, imprégné qu’il était, de matières organiques. Il était littéralement boursouflé par les tombes.
Les allées qui traversaient le cimetière étaient de 30 à 40 cm en contrebas du sol de sépulture et servaient, par conséquent, pendant les pluies, de rigoles dans lesquelles se déversaient les liquides qui ont baigné les cadavres.
Le rapport n’insistait pas sur les inconvénients graves résultant du voisinage immédiat de maisons habitées et de la place sur laquelle se tenaient, les jours de fête, les assemblées et la salle de danse.
La conclusion de ce rapport était claire : pour ces motifs, nous sommes d’avis que le cimetière actuel de Charsonville, d’une superficie insuffisante, se trouve dans les conditions d’hygiène les plus déplorables, et qu’il est souhaitable que dans le plus bref délai, il soit abandonné et transporté en dehors du village.
Translation du cimetière
A la suite des conclusions de ce rapport, cinq ans plus tard, en 1893, la commune envisageait l’achat d’un terrain agricole, d’environ 100m par 60m de largeur, situé à l’est du bourg et à plus de 100m de la première habitation, au lieu dit « les 30 mines de la Basse Cour », pour y créer le nouveau cimetière.
Ce terrain appartenait à Madame de Fougeroux, veuve de Bengy. Celle-ci refusa d’abord en 1892 et 1893 la cession à l’amiable de son terrain à la commune. Après l’obtention du décret déclarant d’utilité publique ce projet et l’expropriation du terrain, Mme de Fourgeroux accepta, début 1896, de vendre pour 2500 francs, une partie de son terrain situé dans l’angle nord de sa pièce de terre, le long du chemin de Charsonville à la Renardière (le terrain du cimetière actuel).
Dès l’achat du terrain par la commune, l’architecte du département adressa un plan pour les concessions du nouveau cimetière au maire fin 1896. La concession pour l’inhumation d’un corps était de 1m de largeur et de 2m de longueur. Chaque concession devait être séparée de celles qui lui étaient proches par un intervalle libre de 40 cm minimum.
Le maçon Thauvin Blanchard de la commune de Lestion (41) accepta en avril 1896 de réaliser les murs du cimetière. Les travaux du mur du cimetière y compris la pose de la grille d’entrée furent terminés en 1897. La réception définitive des travaux du nouveau cimetière avait lieu en février 1898 par l’architecte Dusserre et le maire.
Les inhumations dans le nouveau cimetière se firent donc en 1898 et la commune débuta les translations des anciennes sépultures la même année. Elles se poursuivront en 1899, 1900 et 1901.
Sources
- Archives départementales du Loiret
- Généalogie du Loiret