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Patay :SOUVENIRS DE LA LIBERATION : août 1944:Témoignage de Marie-Térèse GOUJON

Auteur : Poulot  Créé le : 11/04/2013 20:48

Cette lettre, qui a été écrite par Marie-Thérèse GOUJON, est un des témoignages qui ont été enregistrés à l'occasion de  l'explosion du train de munitions, le 15 août 1944 au soir, en gare de Patay.  Loirebeauce-encyclopedia vous en donne ci-dessous le contenu intégrale.

 

 

   En  raison de la proximité du camp de BRICY, PATAY dut subir les méfaits de la guerre.     

                                   Au mois de mars 1944, quelques maisons furent occupées par les allemands, ainsi que l’école des garçons rue de la gare et l’école Jeanne d’Arc ; institutrices et élèves devaient trouver asile dans d’autres locaux, les pensionnaires étaient accueillies dans des maisons amies.

                                    Le camp fut souvent bombardé, des ouvriers étaient réquisitionnés par le garde-champêtre pour déblayer.

                                Le 22 Mai, 10 aviateurs américains trouvèrent la mort dans les communes voisines.

                                Un habitant du faubourg de la Croix Blanche, parlant bien l’anglais, aidait des aviateurs en détresse.

                                Le 6 Juillet, des avions américains bombardaient les embranchements de la gare, sans faire aucune victime, quelques maisons étaient démolies. A partir de ce jour, les habitants du quartier gare quittaient leur maison le soir et couchaient chez des amis.

                                Depuis quelques jours, les allemands chargeaient en gare, un train de munitions.

                                Le mardi 15 Août, fête de l’Assomption, de nombreux fidèles assistaient à la grand- messe. Les vèpres étaient suivies d’une procession. Tout l’après- midi, on entendait des explosions venant sans doute du camp de Chateaudun. Dans la soirée, des allemands semblaient désemparés, ils allaient et venaient dans tous les sens sur la place

                                 Vers 20 heures, un soldat autrichien annonça dans la rue que le train allait sauter et qu’il fallait partir. L’alerte était donnée. Aussitôt presque tous les habitants se mettaient en route, ou bien se cachaient dans leur cave.

                                Tous se dirigeaient vers les fermes de La Vallée, la Detourbe, Vaurobert, sous l’orage et une pluie battante, se disposant à passere la nuit dans les granges, en attendant les évènements.

                                 Au loin, on entendait les chars américains qui passaient sur la route de Saint Péravy.

                                 Vers 22 heures, une lueur gigantesque embrasa le ciel, suivie d’un bruit formidable, le premier wagon sauta, l’explosion fut suivie d’une quinzaine d’autres en l’espace de ¾ d’heure. Sans la pluie providentielle qui tombait depuis 19 heures, tous les wagons auraient sautés en même temps et peut-être l’hospice. Celui-ci était occupé depuis 1940. La déflagration aurait été plus forte, les dégâts encore plus importants. C’était des V1 et V2.

                Quelques hommes courageux et les pompiers se dirigèrent vers la Ville  pour constater les dégâts et éteindre les incendies. Le feu avait pris chez M. ROGER marchand de bois. Malgré les secours, l’incendie dura jusqu’au matin et anéantit la maison et les bâtiments du chantier. Quelques- uns essayèrent de sauver des objets dont M.CHENEAU menuisier, mais en vain. Au matin, il ne resta plus que des murs noircis. La famille ROGER avait tout perdu.

                                    Le lendemain, on se rendit compte du désastre. Dans le petit bois qui longeait la ligne, les arbres étaient calcinés, un wagon était tombé sur une maison qui s’y trouvait, écroulée, comme un château de cartes, un morceau de rail était noué autour d’un arbre. Toutes les maisons environnantes avaient été soufflées, toitures et fenêtres arrachées, cloisons démolies, une quarantaine inhabitables, la plupart des autres endommagées. La rue était jonchée de débris de toutes sortes. Mais par miracle aucune victime n’était à déplorer.

      Le curé doyen Mr l’abbé BLANDIN avait une grande dévotion à Notre dame de Lourdes et lui avait confié sa paroisse. Plus tard, une plaque fut posée dans l’église pour remercier la Vierge de sa protection.

      Les habitants se mettaient au travail pour déblayer leur maison.

      Vers 11 heures, un cri retentit : « Voilà les américains » quelques chars américains venant de la route de Villeneuve-sur-Conie arrivèrent en éclaireurs. Ils furent aussitôt entourés, félicités. Puis après un passage rapide dans les rues dévastées, ils retournèrent vers Villeneuve. Alors les drapeaux sortent de leur cachette et décorent fenêtres et balcons.

      On promena dans les rues un prisonnier allemand attaché sur une camionnette.

      Le lendemain 17, aux premières heures du jour 150 à 200 soldats débarquent des camions et  prennent position aux quatre coins de Patay. Hélas, ce sont des allemands ! ils encerclent la ville et empêchent toute sortie. Ils libèrent le prisonnier allemand enfermé à la Gendarmerie. Tous les drapeaux disparaissent immédiatement.

      Une institutrice de l’école Jeanne d’Arc, voulant mettre à l’abri ses deux pensionnaires, se présenta au barrage pour aller chercher du lait dans une ferme. On la laissa passer.

      Puis, on apprit que les allemands réclamaient des otages. Des noms étaient cités : en premier : M. le curé : l’abbé BLANDIN, M. Louis LEGER, le Maire et bien d’autres encore. Ils menaçaient de les fusiller si les munitions que les allemands avaient laissées à l’hospice et qui avaient été prises par la Résistance, ne leur étaient pas livrées.

        Toute la  population était prise de peur, les hommes se cachaient, la journée se passa  dans l’angoisse.

    Sans doute à la suite de transactions et l’arrivée d’un officier supérieur, les allemands décrétaient le couvre- feu à 20 heures. Chacun s’enfermait chez soi.

    Peu après, les camions allemands disparaissaient, c’était bien vrai, ils étaient partis, et ne reviendraient plus.  Quel soulagement !

    Le matin du 18 août, les drapeaux ornaient de nouveau les façades.

    L’église avait souffert, quelques trous dans la voûte et des bancs endommagés. Les deux vitraux représentant Jeanne d’Arc et bénis à l’occasion du 5ème centenaire  de la victoire de Patay, étaient intacts, tous les autres brisés.

    Durant plusieurs jours, nous vîment passer beaucoup de tanks et camions américains se dirigeant vers Rouvray. Certains se portaient à leur rencontre en faisant le V de la Victoire, pour avoir cigarettes et chocolat. C’était la libération.

    Il fallait maintenant reconstruire et réparer et pour les sinistrés, trouver à se reloger.

    Dès le 18, les équipes de la défense passive et des hommes de bonne volonté étaient requis pour déblayer les rues et aider les sinistrés à sortir de leurs décombres.

       Mademoiselle Marie-Thérèse GOUGON (témoin)