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La géographie de Charsonville par M. ALLUIS instituteur en1873

Auteur : Admin  Créé le : 30/11/2019 19:24
Modifié le : 11/10/2021 13:47
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Ce qui a été enseigné dans les écoles de nos villages par les valeureux instituteurs au 19ème siècle, constitue, aujourd'hui un témoignage important sur l'histoire de nos racines, sur notre histoire en générale tout simplement.

Ci-dessous des extraits des cours de géographie qu'Athanase Désiré ALLUIS enseignait à ses élèves en 1873/1874.

Athanase Désiré Alluis est né à Prénouvellon en 1827, marié le 9 février 1849 à Marie Louise Boissonnet (la fille de Charles Boissonnet, ancien instituteur à Charsonville). Ils eurent comme enfants : Marie Eugénie née le 12 avril 1852 et Louise Adeline née le 23 octobre 1853. Marie Louise décédera en 1903 et Athanase Alluis décédera le 11 juin 1907 à l’age de 80 ans. Ils sont enterrés dans l’actuel cimetière (allée principale) de Charsonville.

 

1ère Leçon

Depuis que vous êtes nés vous avez déjà bien des fois parcouru la commune de Charsonville sans vous être probablement arrêtés sur ce qu’il y a de plus remarquables.

Je veux aujourd’hui vous donner une idée de ce que renferme notre commune concernant ses productions, sa population, ses villages, etc. .

Vous y apporterez j’espère toute l’attention dont vous êtes capables.

Vous avez entendu souvent prononcer ce mot « commune », sans vous en rendre probablement un compte exact : communes de Prénouvellon, d’Ouzouer, de Baccon, d’Epieds qui touchent la nôtre et bien d’autres dont vous n’avez pas même entendus prononcer les noms.

Il y en a en France 35000 environ.

La commune est la réunion de plusieurs familles qui concourent aux mêmes dépenses et aux mêmes bénéfices. Les familles sont administrées par le père qui s’occupe de toutes les dépenses et de toutes les recettes de la maison.

A la tête de la commune, c'est-à-dire de la réunion de plusieurs familles, se trouve un Maire et un Conseil Municipal qui, comme le père pour la famille, s’occupe des dépenses et des recettes de la commune et encore de maintenir de l’ordre qui doit y régner…..

Vous connaissez le nom de notre village qu’on appelle bourg de Charsonville. Mais au milieu de maisons il y en a quelques unes qui doivent particulièrement fixer notre attention, telles sont la maison ou vous avez été élevés, la Marie, l’Eglise, l’Ecole.

2ème Leçon

La commune de Charsonville, comme toutes les autres communes de France, a été arpentée il y a peu près 40 ans, non seulement la commune, mais la contenance de chaque pièce de terre a été connue. Ce travail a été fait pour répartir également les contributions que chaque personne doit payer au gouvernement. Chaque pièce de terre a été classée d’après sa qualité, car vous savez qu’il y a des pièces de terre meilleures les unes que les autres, et meilleures elles sont plus elles paient de contributions.

La commune de Charsonville a une contenance de 2400 hectares de terres aujourd’hui labourables, mais autrefois il y avait de la vigne sur son territoire. Les dernières pièces ont disparu depuis 25 ans. On a trouvé que ces terres rapportaient davantage ensemencées en grains. Ces 2400 hectares sont cultivés par les habitants de la commune répartis dans les divers hameaux que vous connaissez : Villorceau, Champdry, Villaine, Chevenelle, Ourcis, Villemain.

La population de la commune a beaucoup augmenté depuis quelques années ; ainsi en 1836, il y a seulement 38 ans, elle était de 829 habitants et aujourd’hui elle atteint le chiffre de 964 habitants.

Le sol est plat, très favorable à la culture, sans accident de terrain, sans aucun cours d’eau, aucun bois, en un mot, c’est un terrain très découvert, consacré tout entier à la culture des céréales et des prairies artificielles qui nourrissent un assez grand nombre d’animaux domestiques.

3ème Leçon  Voies de communication

Une grande amélioration a été faite dans notre commune au point de vue des communications. Aujourd’hui notre commune est sillonnée par une belle route départementale qui conduit d’Orléans au Mans et par un beau chemin de moyenne communication de Meung à Châteaudun et en outre par un beau réseau de chemins vicinaux qui relie tous les hameaux de Charsonville au chef lieu de la commune excepté un seul ; Chandry qui ne jouit pas encore de cette faveur, mais il faut espérer que d’ici à quelques années nous verrons les enfants de ce hameau prendre le chemin de notre classe et qui en sont éloignés aujourd’hui par les mauvais chemins.

Vous ne sauriez croire, mes enfants, quels immenses avantages offrent aux communes ces voies faciles de communication, non seulement pour la culture des terres, mais encore pour faciliter la vente des grains.

Aujourd’hui les fumiers, les terreaux, tous les engrais sont transportés sur les terres en tous temps et en toute saison, avec une grande facilité. La vente des grains se fait aussi bien plus facilement. Voyez comme vos pères conduisent le produit de leurs terres à Orléans, à Meung et les vendent bien plus chers que s’ils étaient obligés comme autrefois d’attendre à la maison les acheteurs qui les achèteraient à un très bas prix, attendu les difficultés que ceux-ci éprouvaient à les conduire au marché le plus voisin. Il n’y a pas longtemps que pour aller à Orléans ou à Meung les chemins étaient aussi mauvais que celui qui conduit à Chandry. Il y a à peine 15 ans, les enfants de tous les villages de Charsonville ne pouvaient se rendre à l’école qu’à l’age de 8 à 9 ans. Aujourd’hui vous y venez à l’age de 6 et 7 ans et bien plus facilement.

Autrefois on se rendait au bourg de Charsonville qu’avec de grandes difficultés de tous les villages de la commune. Ainsi les routes qui, entretenues par le Département ou par l’Etat, et les chemins vicinaux qui sont entretenus par les communes sont une source de richesses pour ces dernières, attendu qu’elles vendent le produit de leurs terres, leurs bestiaux, à un prix plus élevé qu’autrefois. Vous voyez par là que les prestations auxquelles chaque homme est imposé doivent être faites régulièrement et il serait coupable celui qui refuserait de remplir cette obligation. Il négligerait sérieusement ses intérêts. J’espère que vous tous, vous emploierez bien votre temps sur les chemins vicinaux (quand vous serez appelés à y travailler).

4ème Leçon Nature des sols

Le sol de la commune de Charsonville est une terre franche, très propre à la culture des céréales et à la production des prairies artificielles. Les principales cultures sont : le froment, l’orge, l’avoine, la pomme de terre, le trèfle, le sainfoin et le trèfle farant ou trèfle rouge.

660 hectares de froment sont cultivés chaque année à Charsonville, donnant année moyenne 10000 hectolitres

269 hectares d’orge donnant 5600 hectolitres

et 580 hectares d’avoine qui peuvent produire 16000 hectolitres.

Les prairies artificielles occupent aujourd’hui toutes les terres qu’on laissait autrefois en jachères, c'est-à-dire en guéret et nourrissent une grande quantité de bestiaux. Une plante, surtout introduite dans la commune depuis 25 à 30 ans, rend un très grand service à l’agriculture ; je veux parler du trèfle rouge qui donne ses produits de très bonne heure. Au mois de mai on peut le couper et le donner aux bestiaux qui s’en nourrissent très bien en attendant les autres plantes, car à cette époque il arrive souvent que les fourrages font défaut et ce trèfle rouge y supplée avec avantage.

N’oublions pas la pomme de terre, ce pain des malheureux, dont la culture s’est répandue, non seulement à Charsonville, mais dans une bonne partie de la France et rendons aussi un hommage mérité à l’homme qui l’a introduite en France ; Parmentier. Ce bienfaiteur de l’humanité a doté sa patrie d’un aliment qui rend de grands services dans l’alimentation des personnes et des animaux. Vous voyez dans la saison un grand nombre de champs de pommes de terre qui donnent une quantité immense de ces tubercules tous consommés dans la commune par les personnes et les animaux ; il n’en est pas vendu hors la commune, au contraire, je pense qu’il y en est introduit du dehors.

3600 hectolitres au moins sont récoltés dans la commune.

Autrefois la vigne était cultivée à Charsonville mais depuis 25 à 30 ans elle a fait place aux céréales de sorte qu’aujourd’hui cette culture a disparu entièrement de la commune.

Les produits industriels font défaut à Charsonville, loin des cours d’eau et des chemins de fer. Il ne faut guère espérer que notre commune soit un jour industrielle. Nous avons comme vous savez quelques moulins à vent pour moudre le grain et quelques carrières de pierres à bâtir mais seulement pour les besoins de la localité.

L’agriculture a fait de grands progrès dans la commune. Depuis quelques années par les amendements qu’on introduit dans les terres, le terreau surtout.

Toutes ces terres que l’on transporte, d’un endroit à l’autre, amendent le terrain et lui donnent plus de stimulants pour la production des céréales. Les engrais artificiels, tels que le guano, ne sont pas encore introduits dans notre commune ; c’est une faute, car les engrais manquent quelquefois et le guano les remplacerait avantageusement. Il faut espérer que les cultivateurs, mieux éclairés sur leurs véritables intérêts, finiront par s’en servir ; c’est surtout en prairies artificielles que les progrès se font le plus remarquer. Aussi le nombre de bestiaux entretenus dans la commune est bien plus considérable qu’autrefois : nous avons chez nous ; 150 chevaux employés à l’agriculture, 450 vaches dans nos étables et peut être 2500 brebis dans nos bergeries, 2000 poules, sans compter les poulets vendus sur les marchés. Toutes ces productions sont une source de richesses pour le pays que l’on pourrait résumer ainsi.

Je ne parle que des produits vendus et non ceux qui sont consommés dans la commune.

Une vache peut produire en beurre fromage et veau 300 francs par an, soit pour nos 450 vaches 135 000 francs. Les 2500 brebis en laine et agneaux : 40 000francs. Chaque poule peut donner un œuf tous les deux jours pendant 8 mois ou un œuf tous les jours pendant 4 mois soit 18 000 francs. 2000 poulets vendus 2 francs la pièce soit 4000 francs. Total 197 000 francs.

5ème Leçon Maison Seigneuriale

Vous avez étudié l’histoire de France, vous savez que ce pays a été pendant longtemps gouverné par des seigneurs qui faisaient même la guerre au roi ; c’était le temps de la féodalité.

Ces seigneurs habitaient leurs châteaux qui se trouvaient sur tous les points de la France.

La maison située au milieu du bourg de Charsonville et s’élevée au dessus des autres était la maison seigneuriale ou habitait le seigneur.

Les premiers seigneurs de Charsonville sont : Jean d’Orléans, Payen d’Orléans, son fils. Cette seigneurie appartint successivement aux familles d’Orléans, de Brissonnet, de Mazeau, de Beaune, de Montmorency. Au 18 ème siècle on remarquait encore dans le vitrail du chœur de l’église les armes de Montmorency.

On voit encore dans un tableau de la façade de cette maison, mais très détériorés, les écussons d’une de ces familles. Aujourd’hui un cabaret et une forge sont établis dans cette maison. Des sculptures aux portes et aux fenêtres, aux poutres annoncent qu’elle a été construite du règne de Charles VII.

 

L’église

Le chœur et le sanctuaire de l’église datent du 13ème siècle. Cette église sous le vocable de St Martin et de St Loup attire un grand nombre de pèlerins chaque année.

 

Presbytère

Le presbytère appartenait à la Fabrique avant la Révolution de 1789 mais à cette époque la Nation s’en est emparée en vertu du décret du 13 brumaire an II.

Il a passé successivement entre les mains pour achat des nommés Boucher de Villamblain et François Gasnier, notaire à Orgères. Celui-ci l’a cédé à la commune de Charsonville en 1874.

La république l’avait vendu 1800 livres et la commune l’a acquis comme je viens de le dire en 1814 moyennant le prix de 5200 francs. La commune s’est réservée une chambre du presbytère pour lui servir de mairie. Cette chambre est en mauvais état.

 

 

Ecoles

Les premières fondations de l’école où nous sommes en ce moment ci ont été jetées dans les premiers jours du mois de mars 1851. Elle a été achevée dans le courant de la même année, mais l’instituteur et l’institutrice n’en ont pris possession que le 10 mai 1852.

A cette époque l’instituteur était M Alluis et l’institutrice Mlle Rémy.

L’école est placée dans une position désavantageuse pour l’arrivée des enfants, à l’opposé de tous les hameaux de notre commune.

Vous êtes obligés de traverser le bourg qui a une longueur de 600 mètres au moins pour y arriver. Mais à cette époque on avait hâte de construire une maison d’école, Charsonville était en retard sous ce rapport. On s’est emparé du premier terrain qu’on a trouvé a acheter cependant les chemins pour y arriver sont en très bon état.

Charsonville, le 18 février 1874

L’Instituteur

Signé : Alluis

Copié sur l’original les 25 et 26 décembre 1891 par l’instituteur à st Jean de la Ruelle : M Lenormand qui a connu tout particulièrement M Alluis qui était instituteur à Andonville alors que M Lenormand l’était à Boisseaux.