Tournoisis:la tornade du 7 septembre 1876
Au moment où le réchauffement climatique mobilise l'opinion, les archives nous rappellent que des phénomènes météorologiques "anormaux" se sont abattus sur notre Pays et y ont fait de très gros dégats.
Tournoisis
Le cyclone du 7 septembre 1876
Ci-dessous une description du passage du cyclone sur la commune de
Tournoisis, extrait du journal « L’Avenir du Loiret ».
Une trombe épouvantable, allant de l’ouest à l’est, a passé hier sur le
canton de Patay et y a causé d’affreux désastres. Le bourg de
Tournoisis est en partie détruit, celui de Coinces est en ruines. Vers 5
heures du soir, une première tempête s’était abattue sur Saint Péravy-
la-Colombe. Mais bien que le vent soufflait en tourbillon avec une
extrême violence, ce village en a été quitte pour une pluie torrentielle
accompagnée de grêle tombant avec une effroyable impétuosité. Peu
après, vers 5 heures et demie, apparut à l’ouest un nuage d’une
noirceur effrayante, dans lequel des éclairs blafards ou violets
traçaient à chaque instant de larges découpures. Le tonnerre grondait
sans discontinuer avec des éclats plus ou moins violents. Ce nuage
touchait presque la terre, et dans ses flancs retentissaient
mystérieusement des bruits sourds et continus, semblables aux
détonations répétées d’une artillerie lointaine. A deux lieues à la ronde
on entendait le ronflement formidable de cette nuée dévastatrice et on
ne pouvait, en la voyant s’avancer, se garantir d’un sentiment
invincible d’effroi. A 6 heures, elle disparaissait vers l’est mais, hélas !
Que de ruines lançait-elle sur son passage.
A Tournoisis, l’extrémité du bourg est partiellement détruite ; nombre
de maisons, notamment celle du maire, n’ont plus ni toiture ni
charpente. Quelques unes sont presque totalement démolies. La route
est obstruée de leurs décombres et les champs environnants sont
jonchés de débris de toutes sortes. La violence de la tempête était
telle qu’un tombereau roula seul, avec une rapidité étonnante, pendant
une assez longue distance, et ne s’arrêta que pour être renversé et
entraîné par les éléments déchaînés.
Il n’y a, malheureusement, pas à déplorer que des dégâts matériels. Il
y a aussi mort d’hommes. Le nommé Piqueret, journalier, se trouvait
sur le seuil d’une porte lorsque, soulevé par le vent, il fut emporté avec
une force extraordinaire contre un mur voisin ou tombait au même
moment une toiture enlevée. Le malheureux fut enseveli sous les
débris de cette toiture et littéralement broyé ; il n’était marié que
depuis deux ans à peine.
A Tournoisis, 50 bâtiments ont été atteints. Les uns sont presque
entièrement détruits, les autres n’ont plus de pignons, la plupart sont
sans charpentes ni couvertures. Sur le sol, ce ne sont que poutres
brisées, que chevrons rompus, que monceaux de tuiles et d’ardoises
broyées, que planches cassées, que morceaux de fer ou de zinc
tordus, que gerbes dispersées et semées.
Tout ce qui se trouvait sur le passage de la trombe était à l’instant
enveloppé et emporté ; des meules de blé et d’avoine, on ne retrouve
pas une gerbe intacte, on n’aperçoit de loin en loin que les liens qui les
retenaient. Des arbres énormes, des noyers séculaires ont été
arrachés et traînés sur une longueur extraordinaire. Des chariots et
des voitures ont été emportés à plusieurs kilomètres et brisés avec
leurs essieux. Les poulaillers des champs, les cabanes des bergers,
les claies des parcs ont totalement disparu et il est triste en ce moment
de voir une foule de cultivateurs rechercher dans la plaine les
planches qui les composaient et ramener leurs poules mortes.
Hors journal : un acte, dressé le 7 septembre 1876 à 7 h du soir par le
maire de Tournoisis (Marmasse), enregistre le décès de François Félix
Pascal Piqueret sans signaler l’événement météorologique. Le décès
a eu lieu à 6 h du soir au hameau du Portail. François Piqueret était
journalier, âgé de 32 ans et domicilié à Nids. Il était né de Charles
Piqueret et de Marie Blusson. Il avait épousé Eulalie Marie Léontine
Pointereau en 1874 avec laquelle il a eu un fils nommé Gustave
Raymond né en 1875. Eulalie se remariera à Orléans en 1880 avec
Pierre Bonnard.