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Chemin de Fourneaux au Bourg de Chaingy: Une très longue histoire

Auteur :  Créé le : 04/01/2014 22:37
Modifié le : 14/09/2014 12:36

La réfection du chemin de Fourneaux au bourg deChaingy, une très longue histoire.(1769-1935)

Par J-C Dumort de Chaingy

 

Le constat : un chemin en piteux état depuis au moins 1769

 

« L’an mil sept cent soixante neuf, le cinq février, les habitants assemblés au banc de l’œuvre, à la manière accoutumée, après avoir été convoqués au son de la cloche, ont représenté que, vu les accidents qui arrivent fort souvent dans la rue qui va de Chaingy au grand chemin, il fallait s’adresser à M. l’Intendant pour lui demander le rétablissement de ladite rue qui était la seule qui servait à tirer la plus grande partie des vins de la paroisse et qui était devenu impraticable, que lesdits habitants étaient prêts à y travailler s’il plaisait à Monseigneur de l’ordonner, que ledit Seigneur serait supplié de les exempter des autres corvées pendant le temps qu’il faudrait pour rétablir ladite rue. Dit et arrêté en présence de la plus grande partie des habitants, dont ceux qui ont su signer ont signé, les autres ont déclaré ne savoir signer. » Ce document est extrait du registre de la fabrique i. C’est le seul texte du registre de la fabrique couvrant la période 1722-1789 qui traite d’autre chose que la gestion de l’église. C’est aussi le premier d’une longue série de documents dans lesquels on déplore l’état lamentable de la voie reliant le bourg à Fourneaux. Rappelons que cette voie désenclave Chaingy en reliant le bourg à la grande route d’Orléans à Blois et Tours.

Dix neuf ans plus tard rien n’a changé. En réponse à un questionnement de l’assemblée du département d’Orléans et Beaugency, l’assemblée municipale de la paroisse indique, le 10 février 1788 que « les chemins sont impraticables pendant six mois par an ». Il est probable par contre que la route d’Orléans à Blois et Tours, dénommée royale jusqu’en 1791, puis grande route et enfin impériale, était toujours en état de viabilité correcte.

Le 10 octobre 1789, la municipalité émet le souhait de la réparation du chemin du bourg à Fourneaux.

Le 12 pluviôse de l’an VI (31 janvier 1798), l’administration municipale du canton de La Chapelle-Mesmin, accompagnée des gardes nationales de La Chapelle et de Chaingy se rendent du chef-lieu de canton à Chaingy pour y planter un arbre de la Liberté ii. Le cortège marche au tambour, c’est à dire au pas, de la Chapelle-Mesmin au carrefour de Fourneaux. Mais là « le tambour étant obligé de cesser par rapport au mauvais chemin, des citoyens entonnent et chantent des hymnes patriotiques, jusqu’à une petite distance [du bourg], où la colonne se forme de nouveau ». Il est probable que le chemin redevenait praticable à l’entrée du bourg. « Le cortège fait le tour de la place du bourg, les mauvais chemins ne permettant pas de prolonger la promenade ». L’état des chemins rayonnant à partir de la place du bourg devait être encore plus pitoyable.

Le 20 pluviôse de l’an XII (8 février 1804), le conseil municipal fait observer au préfet le mauvais état de la route, « très importante pour la prospérité de la commune », qui va du bourg à la grande route de Fourneaux. Elle est  absolument impraticable six mois de l’année. « Les frais de transport d’une pièce de vin du bourg à Fourneaux dépassent parfois 3 francs, ralentissant la vente du vin qui es, souvent limitée à la belle saison ».

Le 4 février 1806, le conseil municipal constate que le chemin du bourg à Fourneaux n’est toujours pas praticable et que les vins ne peuvent pas être enlevés.

Le 3 mai 1808, le conseil municipal constate que tous les chemins vicinaux de la commune sont, en saison des pluies, absolument dégradés et impraticables. Du fait des coûts d’enlèvement les vignerons subissent un préjudice important puisque les vins sont vendus, à la cave, seize à vingt deux francs la pièce alors que le prix habituel est de trente francs.

Le 15 décembre 1815, le conseil municipal note que tous les chemins vicinaux sont dans un état effroyable. Mais il n’y a pas d’argent et aucune dépense extraordinaire n’est possible.

Le 14 décembre 1817, « les chemins sont si mauvais qu’ils sont connus comme tels à deux lieues [environ huit kilomètres] à la ronde, ce qui nuit beaucoup à la vente du vin et autres productions ».

Le 21 juin 1818, « ces chemins ont été jusqu’ici dans un tel état d’abandon que les vins qui sont sa principale production ne pouvaient s’en extraire que difficilement et que les marchands pour cette raison n’y venaient qu’avec répugnance et lorsque les communes environnantes n’en avaient plus à vendre ».

Trente ans de discussions et de délibérations mais rien, ou presque, sur le terrain

 

En 1788, l’assemblée intermédiaire provinciale a établi le chemin du bourg à Fourneaux comme atelier de charité. Le trésor public a fourni mille livres en 1789 et mille livres, dont seulement cinq cent effectivement versées, en 1790 pour acheter des matériaux, outils et « ouvrages de l’art » iii.

Il semble qu’il n’y ait pratiquement pas eu de travaux sur la route. En effet le 21 germinal de l’an III (10 avril 1794), le secrétaire du district d’Orléans écrit au maire. Il lui rappelle qu’en 1792 (vieux style) la commune a bénéficié d’une somme de mille livres, dont cinq cent livres ont été versées, pour l’établissement d’un atelier de charité. Le district n’a reçu aucune « feuille d’emploi » de cette somme et le secrétaire demande de rendre la somme versée ou de faire rapidement une feuille d’emploi pour les cinq cent livres. La réponse du maire, en date du 3 floréal, est quelque peu embarrassée. La somme de cinq cent livres a bien été touchée et employée pour le chemin du Bourg à Fourneaux « en conséquence fait voiturer [le nombre est resté en blanc] tombereaux de pierre sur cette rue, nous y avons placé des ouvriers pour la rendre praticable. [Mais] la rareté des bras […], le prix exorbitant où il a fallu porter les journées de travail et la modicité de la somme accordée ne nous ont pas permis de mettre à cet emploi toute l’activité que nous avions désirée ». Il aurait écrit plusieurs fois à l’administration qui n’a pas répondu. Puis, retournant quelque peu les données du problème, il écrit « nous nous emploierons, dès qu’un secours plus considérable nous fournira les moyens, à commencer cette entreprise, que les réquisitions de bras pour la moisson, le battage des grains, l’abattage et l’emploi du bois converti en charbon pour en extraire la poudre, la fouille des terres pour le salpêtre et l’impossibilité de fournir du pain aux ouvriers ne nous ont pas permis d’entreprendreiv ». Le maire ne donne pas de compte rendu de l’emploi des cinq cent livres et avoue, en fait, qu’à part le charroi de pierres, rien n’a été fait. A la fin de la lettre il souhaite le concours d’un homme de l’art, Guillaume Rigoulot, car il est incapable de fixer la dépense.

En l’an VII, sur réquisition du citoyen Billard, alors commissaire du pouvoir exécutif auprès de l’administration municipale du canton de La Chapelle-Mesmin, cette administration « a eut la faiblesse de solliciter la vente des outils qui fut faite le 29 ventôse de l’an VIII (19 mars 1800 ) v.

Le 20 pluviôse an XII (8 février 1804), à propos du vote du budget, le conseil municipal de Chaingy suggère au préfet que les travaux d’amélioration de la route reprennent. Il devrait plutôt demander qu’ils débutent car rien n’a été fait sauf, en 1789, l’extraction et le transport sur le bord du chemin de pierres dont il reste, en l’an XII, cinq toises employables (environ trente huit M3). Le conseil municipal propose que les travaux soient exécutés « par un entrepreneur qui serait indemnisé par une barrière qui subsisterait en sa faveur jusqu’à fin du payement ». La barrière est, bien sûr, une barrière de péage Une taxation complémentaire en faveur de cette route pourrait aussi être levée auprès des contribuables payant plus de 15 francs d’impôts.

Le 30 frimaire de l’an XIII (20 décembre 1804), le conseil municipal constate qu’il y a sept à huit toises (entre cinquante et soixante M3) de pierres le long de la route et des fonds, insuffisants, dans les caisses de la commune. Il serait possible d’affecter à la réparation de la route les 855,55 F accordés à la commune, par arrêté préfectoral en date du 15 messidor, sur les pertes dues à la gelée de l’an X. Il décide en conséquence :

-que le maire prendra les mesures efficaces pour la réparation de la route ;

-que les fonds disponibles, et en particulier les 855,55 F, dont il a été question ci-dessus, y seront affectés ;

-que le maire fera faire un devis. Le conseil s’engage à en acquitter le montant, dans les cinq ans, grâce à un impôt particulier frappant, « au marc le franc » les habitants payant plus de quinze francs de contributions. On ouvrira, en outre, dans les communes voisines d’Orléans, Ingré, La Chapelle-Saint-Mesmin, Saint-Jean-de-la-Ruelle, Huisseau, Saint-Ay et Meung, une contribution volontaire. Le préfet est supplié de trouver des fonds supplémentaires ;

-que la route devra être parfaite -dans le sens d’achevée- dans l’espace de deux années et que l’adjudication des travaux sera faite au rabais avec publicité par affiches.

Le conseil constate, le 16 pluviôse suivant, que le préfet a déclaré la délibération précédente non conforme aux procédures en vigueur. Il prend une nouvelle délibération, précisant mieux le financement de l’opération. :

-tout habitant fournira autant de journées de travail qu’il paye de fois dix francs de toutes ses contributions, foncière, mobilière, somptuaire, portes et fenêtres et patentes, ceci pendant tout le temps que durera la réparation du chemin ;

-le devis sera fait incessamment par un homme de l’art, qui veillera à ce que l’opération soit des plus solide. La somme sera répartie de manière que la commune ne fournisse pas plus de deux mille journées de travail par an. Un homme de l’art rémunéré, affectera le travail à chacun ;

-on pourra s’acquitter en matériaux ou en numéraires, dans les 10 jours de la réquisition.

En 1806, aucun travail n’a débuté et le chemin n’est toujours pas praticable. Le conseil municipal prend une nouvelle délibération, en date du 4 février 1806, fixant la contribution supplémentaire pour la route à une journée de corvée pour les contribuables payant au moins 10 francs d’impôts et un quart de journée par 2,5 francs au-dessus. La taxation peut être payée en espèces ou en corvée. Le conseil fixe les équivalences : un homme : 1,5 F vi ; un cheval ou un mulet et son conducteur : 3,5 F ; un cheval ou un mulet, une voiture et son conducteur : 5 F, et respectivement, 10 F, 15 F et 20 F si la voiture est à deux, trois ou quatre chevaux. Le maire fera faire un devis pour la réfection de la route. Il pourra employer mille francs sur les réserves de la commune pour payer les honoraires du chef d’atelier et les carriers du voisinage de la route, avec qui il traitera de gré à gré l’achat des pierres.

Le 8 juillet 1806, la mairie dispose du devis établi par M. Friguet, ingénieur ordinaire du département, et vérifié par M. Daillet, ingénieur en chef du département, qui s’élève à 31.164,50 francs, y compris les honoraires du chef d’atelier. La réfection devant s’étaler sur cinq ans la dépense annuelle sera d’environ 7000 francsvii. Les ressources dégagées par les délibérations précédentes ne représentent que 3826 F par an. Pour augmenter les ressources, le conseil municipal décide de deux mesures :

-fixer la journée de corvée à 1,75 francs au lieu de 1,5 francs ce qui, sans modifier l’assiette de la surtaxe en corvée, porterait la disponibilité à 4685,5 francs par an ;

-imposer les fermiers de terres labourables d’un impôt égal à celui que payent les propriétaires qui leur louent les terres. Cette mesure rapporterait « 245 journées à bras et 429,50 F qui, réunis aux 4685,50F précédents, donnent un total de 6115 francs »viii. Les vignerons ne sont pas concernés par cette mesure. Elle ne frappe que les cultivateurs, plus riches que les vignerons.

Il est fait appel à la générosité du préfet. Une souscription volontaire des habitants du bourg est suggérée et enfin, si cela ne suffit pas, le conseil préconise de réaliser la réfection en six ans au lieu de cinq.

Le 10 août 1806 le principe d’une souscription volontaire des habitants du bourg a été acceptée par le préfet. Charles Quétard, propriétaire au bourg, et Jean Baptiste Grillon sont désignés comme commissaires pour recueillir les contributions volontaires.

Le 3 mai 1807, le maire rend compte de l’avancement du projet. La souscription volontaire a été un succès puisque 204 souscripteurs ont promis 2575,75 francs et la souscription n’est pas achevée. En particulier, M. Bailleul, régisseur de M. Cognac de Dampierre, a l’intention de souscrire pour quarante huit francs. Le préfet a félicité le maire et demandé que soit rédigé rapidement le rôle des journées à faire. Le maire fait dresser ce rôle qui est approuvé par le préfet sans réserve. Mais il y a un problème : le préfet a été saisi d’une pétition signée d’un grand nombre d’habitants et de propriétaires contre le rétablissement du chemin en question. Il écrit au maire qu’en conséquence il l’invitait à suspendre tous les travaux. En post-scriptum de sa lettre, le préfet indique qu’on lui assure qu’il existe des chemins plus urgents à réparer et qu’il faudrait commencer par eux. Il compte venir se rendre compte sur le terrain ou envoyer quelqu’un. Il se ravise dans une lettre ultérieure et renvoie la décision au conseil municipal.ix

Le 10 mai 1807, le conseil confirme ses prises de position antérieures, répétées déjà cinq fois et se prononce donc clairement en faveur du rétablissement aussi rapide que possible du chemin du bourg à Fourneaux. Ce chemin étant rétabli, il prendra tous les moyens en son pouvoir « pour rendre praticable, et de manière à porter la charge d’un gammion x avec deux pièces de vin, tous les autres chemins adjacents et conduisant au bourg ». Il confirme ses décisions financières précédentes, sauf l’imposition des fermiers. Il désigne comme caissier de l’affaire un de ses membres, Pierre Gilles.

Mais les travaux sur le chemin de Fourneaux sont ajournés avant même d’avoir commencé. Le 3 mai 1808, le conseil décide de proroger cet ajournement jusqu’en janvier 1809. «En raison de la misère des leurs, qui paraît toujours s’accroître », les impôts supplémentaires pour le chemin ne pourraient pas être levés. Cependant le conseil constate qu’il existe, depuis 1790, « 16 M3 de pierres qui nuisent grandement à la liberté et qu’ils dépérissent sensiblement par l’enlèvement que se permettent une infinité d’habitants ». Il conviendrait de les employer à réparer les « précipices » du chemin à la Croix du Cheneteau et au Moulin à vent. Ceci prouve que rien n’a été fait de sérieux sur le chemin dans les dernières années, puisque les tas de pierres mis en place il y a vingt ans sont toujours au bord du chemin. Accessoirement notons que Gilles, adjoint au maire, fait cadeau à la commune de 1000 (unité  de mesure illisible) provenant des fouilles de sa cave, qui permettraient de réparer le chemin de Tertre au Bourg.

Le 5 août 1809, Henry Pourpardin, propriétaire de la ferme du Goumat a écrit au maire au sujet du chemin du bourg à Fourneaux qui devient de plus en plus impraticable. Il signale qu’il existe 20 M3 de pierre à la Corméllerie xi. Il a déjà « conduit » plusieurs voitures de pierres dans de mauvais trous. Il veut bien encore s’engager à réaliser à ses frais douze charrois. Il s’engage aussi à laisser extraire gratuitement de sa carrière douze toises de pierre (environ 90 M3), si on ne trouve pas la dite carrière trop éloignée. Il est probable que celle ci était au lieu-dit Le Marché de la Pierre, proche de Goumat, soit à plus de trois kilomètres du bourg, sans parler de l’état du chemin de Goumat au Bourg qui devait être épouvantable. Le conseil ne s’occupe de cette lettre que le 13 mai 1810 xii. Il félicite le sieur Poupardin pour son zèle et reconnaît qu’il a une attitude philanthropique. Mais s’occuper de l’amélioration du chemin de Fourneaux implique que l’on lève les impôts supplémentaires votés antérieurement. Or, « si la situation économique des Cabins [aujourd'hui Cambiens] s’est améliorée, elle n’est pas encore parvenue au point ou on désirerait qu’elle fut pour en venir à l’exécution d’une entreprise aussi importante ». Le conseil renvoie une éventuelle décision plus constructive à décembre prochain, si toutefois le préfet veut bien laisser le maire convoquer alors le conseil.

Le 5 janvier 1811, le conseil prend une décision de principe pour le financement de la réparation du chemin, qui s’étalera sur dix ans. Il fixe les prestations en nature à une journée par an pour les personnes imposées entre quatre et dix francs, une journée et demie pour les personnes imposées de dix à quinze francs, deux journées pour celles imposées de quinze à vingt francs et ensuite une journée supplémentaire par tranche de vingt cinq francs d’impôts.

Le 16 avril, une délibération modifie l’assiette de l’imposition : une journée de quatre à dix francs d’impôt, deux de dix à vingt francs, trois de vingt à trente francs puis « un quart de journée par six francs vingt cinq centimes et ainsi de suite jusqu’à l’infini ». On retrouve dans cette délibération des éléments déjà vus à plusieurs reprises : fixation de l’équivalence monnaie de la journée de travail, fixé cette fois ci à deux francs pour un « homme à bras, y compris ses outils », le recrutement d’un chef d’atelier que le maire est autorisé à rémunérer, l’autorisation donnée au maire de traiter avec les possesseurs de carrières proches du chemin, les détails de l’établissement de la matrice et les délais de payement..

On note deux éléments nouveaux : l’indication de la largeur du chemin à dix mètres et l’établissement d’une amorce de calendrier. «Les travaux commenceront cette année vis à vis la porte de la maison de campagne de M. Boucher de Metivier située au quartier du Petit Fourneau. Les pierres qui s’y trouvent seront employées et on continuera s’il est possible, jusqu’à la croix du carrefour du Cheneteau ».

Serait-ce que l’on s’achemine enfin vers le début des travaux ? Et bien oui, les travaux débutent en novembre 1811. Mais à la séance du 7 mai 1812, « le conseil a vu avec peine que depuis janvier les travaux qui avaient été commencés en novembre et décembre pour la réparation du chemin de Fourneaux au bourg avaient été comme abandonnés. Il est convenu unanimement que la misère des temps en était la principale cause ». Il semble que les impôts prévus ne rentrent pas, même sous forme de journées de travail. Le conseil s’insurge : « il y a cependant des gens aisés qui pourraient payer ». Il demande que l’on prenne des mesures à leur égard et qu’on remette en activité un atelier dont l’existence est, pour les indigents, une ressource réelle et véritable. Une délibération, en date du 2 août 1814, nous apprend que la contribution additionnelle pour les travaux n’a été exigée qu’une seule année, en 1811. Il y a 733 extraits de rôle, donc 733 contribuables, habitants de la commune ou propriétaires sur celle-ci. Il est probable que l’on n’a travaillé sur le chemin que pendant les deux mois de fin 1811.

En 1816, alors que, très probablement, on n’a pas travaillé à l’amélioration du chemin depuis l’hiver 1811, la situation s’aggrave. L’administration des Ponts et Chaussées, dans le cadre de la réparation de la grande route « de Briare à Angers », l’a sur-creusée de deux pieds au droit du chemin de Fourneaux au bourg. La pente ainsi créée est trop forte et l’administration municipale proteste. Elle n’obtient pas gain de cause. Mise devant le fait accompli la municipalité délibère, le premier octobre 1816, sur le sujet. La somme pour rétablir une pente acceptable est évaluée à 60 francs, que la commune accepte de payer. Il faut rappeler que cet investissement doit être fait sur la seule portion qui avait été améliorée en 1811.

Et, enfin, la réhabilitation du chemin

Le 14 décembre 1817, on délibère sur l’établissement d’ateliers de charité décidés par l’administration centrale. « Peu de communes offrent autant [de possibilité] d’atelier de charité que celle-ci ». Le conseil préconise parmi eux de débuter par le chemin du bourg à Fourneaux « en commençant par la réparation du dommage qu’a occasionné au chemin l’administration des Ponts et Chaussées lorsqu’elle a fait travailler à la route de Briare à Angers. Ce chemin s’est trouvé coupé à son extrémité et la pente, qui était fort douce, se trouve tout à fait comme une échelle et aucune voiture chargée ne peut plus y monter ni descendre sans le plus grand danger ». La réparation décidée l’année précédente n’a donc pas été exécutée. Pour financer l’atelier de charité un rôle en nature, convertissable en argent, est établi.

Il est question, au conseil municipal, du chemin à deux reprises en 1818 sur des questions annexes. Le 21 mai 1818, on parle d’une haie, appartenant à M. Henry du Cheneteau qui «  anticipe sur la route ». La solution est trouvée en août de la même année : la haie sera arrachée aux frais du propriétaire et replantée d’épine blanche, un peu en retrait, aux frais de la commune. Le 7 juin 1818, un conseiller propose d’assainir une grande surface de la commune en construisant une « arche ou un perray » le long du chemin du bourg à Fourneaux pour donner de l’écoulement aux eaux qui pendant une très grande partie de l’année sont stagnantes et gâtent beaucoup de vignes. Cette proposition, en avance sur son temps, n’est pas retenue.

Le 21 juin 1818, une assemblée comprenant le conseil municipal et dix gros contribuables adopte le rôle décidé en 1817. Elle souhaite que soient ajoutés au rôle trente contribuables payant plus de quarante francs d’imposition et qui ont été oubliés. Ce jour là le maire fait un historique des délibérations concernant le chemin de Fourneaux au bourg en commençant par l’attribution de la subvention de mille francs en 1789. Il relève quinze délibérations mais il en a omise quelques-unes. Le 27 juin 1819, le conseil constate que la perception du rôle essuya peu de refus, mais le premier août 1819 il note que la réparation sur ce chemin est suspendue. Ce même jour le conseil municipal arrête, à la demande du préfet, le tableau des chemins vicinauxxiii. Dans la délibération figurent deux remarques concernant le chemin du bourg à Fourneaux: la largeur du chemin soit trente pieds ou dix mètres et sa longueur 3598 mètres. Le secrétaire s’est manifestement trompé entre les mesures nouvelles et anciennes car il y a entre le bourg et la grande route non pas 3598 mètres mais 3598 pieds, soit environ 1,2 km. On notera que, presque quarante ans après l’instauration du système métrique, les anciennes mesures figurent encore dans des documents officiels.

Le rôle est prorogé pour 1820 par arrêté préfectoral du 25 novembre 1819. On a donc travaillé sur le chemin en 1819 et 1820, mais on n’a pas de détail sur les sections du chemin améliorées et les travaux effectués. Le 16 juin 1820, le conseil constatant qu’il reste 772 journées dues sur le rôle de 1820 souhaite que la commune acquière dix ares, soit une dépense de soixante douze à soixante quinze francs, pour établir une carrière de matériauxxiv. Il est probable que l’appellation « chemin des Carrières » est ce qui reste de cette décision de 1820.

Il semble que l’on n'ait pas travaillé sur le chemin entre 1821 et 1824. En 1825, quand des ateliers de charité sont à nouveau créés sur initiative de l’administration préfectorale, c’est comme toujours, le chemin du bourg à Fourneaux que désigne comme bénéficiaire le conseil municipal, dans sa séance du 6 mars 1825. Ce jour là, il vote un rôle de prestation en nature : chaque contribuable devra autant de fois deux journées de travail qu’il y a d’hommes de plus de vingt ans, de chevaux, de bêtes de somme et de charrette à son foyer. L’équivalence monétaire est de 1,5 francs par journée d’homme, 1,5 francs par journée d’âne, 2,5 francs par journée de cheval de somme -probablement les mulets- et 5 francs par cheval de trait avec collier, charrette et conducteur. Le chantier fonctionnera entre le premier avril et le premier juin, période de faible activité dans les vignes. Ces mesures fiscales sont reconduites en 1826, 1827, 1828 et les années suivantes.

Le 14 mai 1826, le conseil municipal constate que presque tous les habitants s’acquittent du rôle par des journées de travail et qu’il n’y a pas assez de numéraire pour payer la surveillance des travaux et l’achat des matériaux nécessaires. Il vote en conséquence cinq centimes additionnels qui rapporteront 567,45 francs pour subvenir à ces dépenses. Dans la séance du 5 novembre 1826, consacrée au renouvellement du rôle de prestations pour 1827, le maire indique que le chemin du bourg à Fourneaux est « presque à moitié réparé ». Après cette date, le registre du conseil qui chaque année vote le renouvellement des prestations en nature à fournir par les habitants est muet sur l’affectation de ces prestations. Il est logique de penser que notre chemin a été totalement rénové vers 1830 et que les réhabilitations ont commencé sur d’autres chemins importants de la commune.

Un siècle plus tard le chemin du bourg à Fourneaux a connu une transformation qui lui a donné son aspect actuel : le goudronnage. La commune demandait au département, depuis plusieurs années, le classement du chemin du bourg à Fourneaux en « chemin de grande communication » -nous disons aujourd’hui route départementale-. En 1935 le département accepte à condition que le chemin soit préalablement remis en état. Le 30 mai 1935, le conseil municipal décide la remise en état du chemin comprenant : rechargement, goudronnage, établissement d’un bornage hectométrique et réalisation de l’alignement. La somme nécessaire soit 65.000 francs fait l’objet d’un emprunt souscrit par sept habitants de la commune. Les travaux débutent le premier novembre 1935 et s’achèvent le 15 décembre 1935. Munificent, le conseil municipal a décidé de goudronner également le tour de la place du bourg, cent trente mètres de la rue vers Prenay, cinq mètres de la rue vers Huisseau-sur-Mauves -le texte dit « vers les Hautes levées »- et cent trente mètres de la rue vers la Barre. A la suite de cela le conseil général a classé le chemin dans la voirie départementale.

i Archives de la paroisse de Chaingy, conservées aux AD, cote 67 J 1.

ii Registre de La-Chapelle, le 12 pluviôse an VI.

iii Ces informations ainsi que celles qui suivent se trouvent dans RdC en date du 20 pluviôse an XII. Nous ne voyons pas ce que peuvent être les « ouvrages de l’art ».

iv On trouve citées ici les réquisitions dont étaient frappés les hommes de Chaingy. Par républicanisme ou par simple prudence le maire ne cite pas la conscription qui touchait quelque deux cent hommes de la commune.

v Registre de Chaingy, le 20, pluviôse an XII.

vi On retrouve à plusieurs reprises dans les délibérations concernant ce chemin des tableaux d’équivalence qui varient très peu. Le corvéable doit apporter ses outils.

vii Sic. L’arrondi est important.

viii Noter la grossière erreur d’addition qui ne semble pas avoir été corrigée ultérieurement.

ix Tout ce qui précède est relaté dans Registre de Chaingy en date du 3 mai 1807.

x Gammion ou camion : chariot à quatre roues

xi La Corméllerie et la Croix de Cheneteau sont deux lieux-dits, très proches l’un de l’autre, de part et d’autre du chemin de Fourneaux. Les 20 M3 de pierres de 1804 sont très probablement les mêmes que les 16 M3 signalés en mai 1803. L’intention exprimée alors par le conseil de les employer à combler les « précipices » de la Croix du Cheneteau et du Moulin à Vent est restée à l’état de projet.

xii Rappelons qu’à cette époque, le maire ne pouvait convoquer le conseil municipal qu’après autorisation du préfet et que la plupart des séances se tenaient, à des dates fixées par le préfet, pour voter le budget et les comptes administratifs.

xiii Ce tableau n’est pas parvenu jusqu’à nous.

xiv A cette époque toute les décisions des conseils municipaux, sauf le budget de fonctionnement appelé budget ordinaire, devaient être approuvées par le préfet. On trouve donc indifféremment décide ou souhaite pour les délibérations soumises à accord du préfet.